Critiques

CRITIQUE - Le Stabat Mater de Pergolesi : Témoignage musical d’une fin inexorable

CRITIQUE - Le Stabat Mater de Pergolesi : Témoignage musical d’une fin inexorable

Si la journée du 11 novembre s’est présentée sous un ciel gris maussade annonçant une pluie battante automnale, c’est un vibrant et chaleureux concert qui attendait en soirée les auditeurs et auditrices des Violons du Roy à la Salle Bourgie. L’orchestre présentait le Stabat Mater de Pergolesi, sous la fine direction de Jonathan Cohen, quelques 24 heures après la même prestation dans la capitale du QuébecPour l’occasion, l’ensemble était accompagné par Carolyn Sampson et Tim Mead, deux chanteurs britanniques.

Le concert a débuté avec l’œuvre au caractère solennel Silete Venti, un motet pour soprano et orchestre du compositeur anglais Georg Friedrich Haendel. La soprano a livré une performance limpide, remplie d’assurance et de musicalité, le tout soutenu par un regard flamboyant des plus charismatiques. Alors qu’elle est surtout connue pour sa carrière d’opéra, Carolyn Sampson sait tout aussi bien manier le répertoire vocal baroque.

Après le Concerto ripieno pour cordes en sol mineur de Vivaldi, une œuvre entièrement instrumentale, nous avons pu découvrir la voix de Tim Mead dans l’œuvre Cantate Cessate, omai cessate du même compositeur. Si le contreténor a généralement offert une belle prestation avec une projection sonore parfaite pour l’acoustique de la Salle Bourgie, il a semblé quelque peu hésitant dans certains passages qui demandaient de plus grands intervalles vocaux. Il a toutefois été relativement facile de faire abstraction de ces quelques incertitudes dans l’écoute de l’œuvre. Un bref geste de la part du contreténor s’essuyant le sourcil avec un regard complice au chef lors de leur accolade à la fin de l’œuvre qui clôturait la première partie du concert nous porte cependant à croire que le chanteur semblait lui-même soulagé des résultats de sa prestation. 

Le Stabat Mater a ensuite été présenté en deuxième partie du concert. Quelle pièce! Cette œuvre religieuse écrite par Giovanni Battista Pergolesi s’est en fait avérée son ultime legs à la communauté musicale, puisque le compositeur est décédé au trop jeune âge de 26 ans quelques semaines après avoir achevé cette compositionÀ l’écoutela performance offerte par Carolyn SampsonTim Mead et les Violons du Roy était tout à fait poignante et si bien rendue. Il faut aussi noter le jeu musical de Sampson qui a livré une prestation tellement vivante et presque douloureuse par moment. Soulignons entre autres la fin du sixième air, « Vidit suum dulcem natum », où la soprano a terminé le passage presque dans un murmure pourtant si résonnant, qui a coupé le souffle au public. Par contre, en observant la scène, il était facile de constater qu’il n’y avait aucune communication entre les deux solistes, pas même un regard. Sampson observait son public avec attention et générosité, alors que Mead, qui affichait toujours un regard rempli d’incertitude, était plus souvent plongé dans sa partition. Dommage pour une œuvre aussi transcendante. 

On ne se lasse toutefois jamais de voir un orchestre comme les Violons du Roy, où tous les instrumentistes semblent toujours animés par leur passion musicale. L’ensemble a livré une solide performance, mis à part un tout léger cafouillage du côté des violons dans la première œuvre de la soirée, au début dun mouvement rapide. Sous le fin doigté de Cohen, l’orchestre ne cesse ainsi de surprendre ses spectateurs et spectatrices par la manière dont il rend la musique baroque bien vivante.

Le Stabat Mater de Pergolesi

Haendel, Silete Venti, motet pour soprano et orchestre, HWV 242
Vivaldi, Concerto ripieno pour cordes en sol mineur, F, XI/21, RV 157
Vivaldi, Cantate Cessate, omai cessate, RV 684
Pergolesi, Stabat Mater, P 77

ORC : Les Violons du Roy

Production
Les Violons du Roy
Représentation
Salle Bourgie , 11 novembre 2022
Direction musicale
Jonathan Cohen
Interprète(s)
Carolyn Sampson (soprano), Tim Mead (Contreténor)
Partager: