Critiques

(Maria Lacey (Cendrillon) dans Cendrillon de Massenet, Festival d’art vocal de Montréal, 2018. Crédit photo: Pierre-Étienne Bergeron)

En guise de clôture du stage de l’Institut canadien d’art vocal et du Festival d’art vocal de Montréal, les directeurs artistiques de l’Institut Joan Dornemann et Paul Nadler avaient choisi de présenter Cendrillon qui compte parmi les opéras les plus populaires et les plus souvent joués du compositeur Jules Massenet. Ce choix était judicieux en ce qu’il permettait à la direction artistique de mettre en valeur de jeunes artistes lyriques qui se sont distingués pendant le stage, mais d’y associer plusieurs autres stagiaires pour y incarner « Les Esprits » et faire partie du Chœur de serviteurs, courtisans, docteurs, ministres, dames et seigneurs. 

À la musique de Massenet qui sert si bien le conte de Charles Perreault, les solistes et choristes ont fait honneur. Dans leur ensemble, leurs prestations vocales ont donné à l’œuvre le charme requis et le travail de préparation musicale de Robin Wheeler n’est certes pas étranger à la qualité des prestations. Mais la qualité du jeu des uns et des autres n’était pas en reste et a résulté d’une direction d’acteurs fort efficace de Joshua Major.

Parmi les membres de la distribution qui ont tiré leur épingle du jeu, il y a lieu de mentionner d’abord Maria Lacey, à qui le rôle-titre a été confié, et qui apporte au personnage la fraîcheur qui lui convient. Pour cette jeune artiste lyrique de Terre-Neuve, la diction française est un défi qu’elle relève fort bien, ce qui est moins le cas de son Prince Charmant incarné par la mezzosoprano Allegra de Vita.

 La soprano américaine Marisa Karchin réussit à incarner une Fée aussi élégante qu’attachante et la voix est d’une justesse exemplaire. Il n’est pas surprenant que celle-ci ait obtenu, un peu plus tôt dans l’année, le prix Joy In Singing International Art Song de 2018. Une mention honorable mérite par ailleurs d’être attribuée au baryton-basse Simon Chalifoux qui a incarné le Modiste avec un humour fin et intelligent. Il ne faudrait surtout pas passer sous silence le remarquable travail d’accompagnent du pianiste Yang Lin qui semblait fort apprécié des chanteurs et chanteuses, mais également du chef Paul Nadler.

Cette production de Cendrillon avait été précédée, deux jours plus tôt, d’un Concert Gala sous le thème « De Poppée à Puccini ». Celui-ci donna lieu à des prestations de très haut niveau, notamment celle d’Allegra de Vita dont l’interprétation de l’air « Parto, parto » de La Clemenza di Tito de Mozart révélait une chanteuse à qui l’opera seria sied fort bien, mais aussi à un magnifique duo « Suzel, buon di » tiré de L’Amico Fritz de Mascagni chanté par la soprano québécoise Carole-Anne Roussel et le ténor ukrainien Alexei Kuznietsov.

Pour le plaisir d’un public qui avait de toute évidence apprécié les prestations individuelles ainsi que les multiples duos et trios, les stagiaires terminèrent le gala sur une note collective en offrant des extraits, fort bien rendus, de West Side Story de Bernstein (« I feel pretty »), de Porgy and Bess de Gershwin (« Summertime ») et de Carousel de Rogers et Hammerstein (« You’ll never walk »).

Il y a lieu de souligner que la 15e édition de l’Institut canadien d’art vocal était dédiée à la mémoire de Jacqueline Desmarais dont la générosité à l’égard du programme a été soulignée, avec justesse, par l’équipe de l’institut tout au long de cette édition.