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OPÉRA-BONBON : L’AVENTURE GOURMANDE D’HANSEL ET GRETEL

OPÉRA-BONBON : L’AVENTURE GOURMANDE D’HANSEL ET GRETEL
(Photo: Carl Matthieu Neher (pianiste), Charlotte Gagnon (Hansel), Guillaume Rodrigue (comédien-chanteur) et Cécile Muhire (Gretel) dans Opéra-bonbon : L’Aventure gourmande d’Hansel et Gretel, Festival d’opéra de Québec, 2018. Photo: Louise Leblanc.)

Moi j’aime les bonbons, chanter, danser et L’OPÉRA ! Dans le cadre de sa mission d’initier les jeunes à l’art lyrique, le Festival d’opéra de Québec présentait cette année dans les différents Patros de Québec, l’opéra jeunesse intitulé Opéra-bonbon : L’Aventure gourmande d’Hansel et Gretel, spectacle des Jeunesses Musicales Canada (JMC) inspiré du populaire opéra d’Engelbert Humperdinck Hänsel und Gretel.

Ce spectacle a pour objectif de faire connaître l’opéra aux enfants par le biais de l’humour et de la fantaisie. Quoi de mieux que le conte merveilleux des frères Grimm plein de péripéties, de bonbons et de personnages colorés pour explorer cet art fascinant et complet. Alliant plusieurs disciplines artistiques, l’opéra est le véhicule idéal pour la découverte de la musique, de la danse, des arts visuels, du théâtre et du chant.

Environ 150 enfants du primaire, les moniteurs et monitrices, ainsi que quelques adultes curieux assistaient à la performance de 55 minutes de ce spectacle rigolo, divertissant et très interactif présenté au Centre communautaire Lucien- Borne des Loisirs du Faubourg.

Production qui captive jeunes et moins jeunes, et qui donne le goût aux plus gourmands de se lécher les babines, ce spectacle vaut le détour pour sa magie, son inventive mise en scène, ses interprètes attachants et naturels. Il faut souligner l’excellence du jeu scénique du trio d’interprètes avec leur complice pianiste – et comédien au besoin – l’intelligence du texte, ainsi que l’ingéniosité du décor simple et amovible fait de trois modules (panneau à trois volets, caisson et coffre), dont les façades sont peintes d’une bibliothèque remplie de livres pour cacher le piano, les accessoires et le module principal, un très grand coffre transformable tour à tour en forêt, maison de confiserie, paravent de changements de costumes, etc.

C’est la soprano Céline Muhire qui a eu l’idée de ce projet. Elle s’est entourée d’une équipe de professionnels chevronnés pour monter une courte version de 15 minutes et le proposer aux JMC qui développa la version actuelle en étroite collaboration avec les concepteurs. Le travail d’Alain Gauthier à la mise en scène, de Pascal Blanchet au texte et à l’adaptation du livret d’opéra, et de Pierre-Luc Boudreau à la scénographie est d’une grande qualité et efficacité.

L’histoire des trois amis qui racontent à leur manière, en musique, le conte d’Hansel et Gretel, n’est en fait qu’un prétexte pour faire connaître aux enfants les différents aspects que comportent un opéra et des œuvres de différents compositeur et langues (russe, italien, français et allemand).

Guillaume Rodrigue, comédien-narrateur, joue le rôle central de l’ami distrait qui adore les friandises. Il essaie de raconter l’histoire, mais où donc est passé le livre du conte d’Hansel et Gretel ?

Le spectacle est un feu roulant interactif. Le pianiste s’exerce. Il réchauffe ses doigts, joue des accords. « Il faut être prêt à l’opéra », dit-il. Il explique le rôle du pianiste à l’opéra versus l’orchestre. Le pianiste doit remplacer tous les instruments de l’orchestre dans ce cas-ci ! On demande aux enfants des noms d’instruments, les mains se lèvent rapidement. Ils sont excités et contents d’être là. Le narrateur essaie d’expliquer ce qu’est l’opéra, les rôles de la chanteuse qui chante aigu, Gretel. Guillaume, le narrateur, n’arrive pas à bien prononcer ce nom qu’il déforme malgré lui. « Gresil, Grebish, Gratouille, etc. ». Les enfants rient de bon cœur. On explique la tessiture de mezzo-soprano ; elle est bonne dans les chansons tristes ! On entend alors la démonstration des voix avec un passage de l’air de Pauline de l’opéra La Dame de pique de Tchaïkovski et l’air « Tornami a vagheggiar », du rôle de Morgana pour soprano léger de l’opéra Alcina de Haendel.

Guillaume ne comprend pas comment « deux voix pas rapport » peuvent chanter ensemble comme dans l’extrait du duo « Dôme épais » de Lakmé. Aussi, pourquoi est-ce une mezzo-soprano qui chante un rôle de petit garçon ? C’est ainsi que le rythme se poursuit tout le long du spectacle.

Aux côtés de Cécile Muhire, qui joue le rôle d’une soprano chantant le personnage de Gretel, Charlotte Gagnon, mezzo-soprano, joue le rôle de Charlotte, une petite fille pétillante et extravagante qui adore et suit des cours de danse espagnole, « Holé ! », la raison de son retard, ce qui sera une occasion de chanter un passage de l’air « L’amour est un oiseau rebelle » de l’opéra Carmen, son rôle rêvé parce que « Carmen est une belle Espagnole qui a plein d’amis et d’amoureux ». Elle joue aussi le rôle du petit garçon gourmand Hansel.

Les jeunes s’identifient facilement à ce grand enfant dans ses questionnements. Qui sont les principaux artisans de l’opéra ? Comment fonctionne la voix? Quelle est la différence entre ténor, baryton et basse? Comment faire comprendre à Guillaume la différence entre ces trois registres ? Le faire chanter ! On assiste alors à une démonstration comique ; il chante basse, mais c’est trop bas avec l’air « O Isis und Osiris », rôle de Sarastro dans La flûte enchantée de Mozart et il chante ténor, mais c’est trop haut dans « La donna è mobile » (un mouchoir à la main comme à la Pavarotti), rôle du duc de Mantoue dans Rigoletto de Verdi. On découvre alors qu’il doit sûrement être de la catégorie baryton, la voix qui se situe entre les deux et qui est la plus répandue des voix d’hommes.

Pour le tenir occupé et concentré, les deux chanteuses décident de lui donner le rôle de Grignote, la méchante sorcière. « Je suis bien trop beau pour faire la sorcière », dit-il. Dans ce rôle, il est tout simplement hilarant. À travers les chants de Hansel et Gretel, les enfants font connaissance avec le Marchand de sable et la Fée Rosée.

Un moment fort : le duo « Viens, frérot, dansons tous deux ! » sur lequel les enfants chantent et dansent. Quand les enfants et les moniteurs reprennent spontanément la chanson immédiatement après le concert, on sait que le pari du Festival d’opéra de Québec, des Jeunesses Musicales Canada et de l’équipe artistique est gagné ! Gagné pour l’excellence

Opéra-bonbon : L’Aventure gourmande d’Hansel et Gretel

Inspiré de l’opéra d’Engelbert Humperdinck sur un livret adapté par Pascal Blanchet.
Oeuvres de Tchaïkovski, Haendel, Delibes, Bizet, Mozart, Verdi et Humperdinck.

Scénographie: Pierrel-Luc Boudreau

Production
Festival d'opéra de Québec
Représentation
Loisirs du Faubourg , 27 juillet 2018
Animation
Guillaume Rodrigue
Interprète(s)
Cécile Muhire (Gretel) et Charlotte Gagnon (Hansel)
Livret
Pascal Blanchet
Mise en scène
Alain Gauthier
Pianiste
Carl Matthieu Neher
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