FESTIVAL D'OPÉRA DE QUÉBEC : DE L’ENVERGURE ET DE LA MATURITÉ
(Photo: Samantha Louis-Jean (Mélisande) et Marc Boucher (Golaud) dans Pelléas et Mélisande de Debussy, Festival d’opéra de Québec/Festival Classica, 2018. @ Louise Leblanc)
À sa huitième édition, le Festival d’opéra de Québec devait démontrer qu’il avait non seulement les ressources permettant de poursuivre la grande aventure lancée en 2011, mais également la volonté – et surtout – la capacité de bonifier la programmation, d’ailleurs qualifiée de « plus ambitieuse que jamais » par le directeur général et artistique Grégoire Legendre. Cette démonstration est maintenant faite ; l’édition 2018 a donné au festival l’envergure dont il a besoin pour se classer parmi les rendez-vous lyriques estivaux incontournables d’Amérique du Nord.
Avec une production majeure d’une œuvre du grand répertoire (La Flûte enchantée de Mozart), une incursion dans l’opéra plus léger (La Belle Hélène d’Offenbach) et un opéra jeunesse (L’Aventure gourmande d’Hansel et Gretel), un concert avec une artiste de réputation internationale (Véronique Gens), ainsi que des rendez-vous avec de nombreuses étoiles montantes de la scène lyrique nationale, le festival a comblé les mélomanes par une masse critique d’activités offertes dans des lieux emblématiques de notre capitale nationale, comme la chapelle du Musée de l’Amérique francophone et la Basilique-cathédrale Notre-Dame de Québec.
L’Opéra – Revue québécoise d’art lyrique a tenu à couvrir le festival de façon exemplaire. Sous la plume de la musicologue Irène Brisson, vous pourrez lire ci-après la critique de l’événement-phare du festival de 2018, la nouvelle production de La flûte enchantée de Mozart dans la mise en scène de Robert Lepage… et dont la vie se prolongera au Metropolitan Opera de New York dans quelques années. Cette production a su toucher le cœur et l’esprit des mélomanes – et les miens aussi – rassemblés à la salle Louis-Fréchette du Grand théâtre de Québec, l’accueil enthousiaste réservé à Rober t Lepage se voulant un signe de solidarité avec celui dont les spectacles SLĀV et Kanata ont fait l’objet, au cours de l’été 2018, de protestations au nom du concept d’appropriation culturelle. La critique musicale du journal Le Soleil Josianne Desloges livre ses vues sur le concert de la soprano Véronique Gens avec Les Violons du Roy qui a donné vie aux opéras de Rameau, Gluck et Mozart avec une intelligence et une finesse qui confirment qu’elle compte parmi des plus grandes sopranos baroques et mozartiennes de l’heure. Prolifique collaboratrice de la revue, la soprano Chantal Parent partage ses impressions du concert d’ouverture réunissant les sopranos Suzanne Taffot, Lauren Margison, Claire de Sévigné et Gianna Corbisiero, de l’opéra-bonbon L’Aventure gourmande d’Hansel et Gretel et du récital de la soprano Magali Simard-Galdès.
À ces critiques, j’ajoute ma voix pour commenter trois autres événements auxquels j’ai assisté durant le festival. L’un des grands moments lyriques aura été la présentation le 29 juillet 2018 de la version concertante de Pelléas et Mélisande de Debussy, occasion de souligner le centenaire de la mort du grand compositeur français et d’entamer un nouveau partenariat avec le Festival Classica. Chaque membre de la distribution a contribué à ce succès, qu’il s’agisse de Samantha Louis-Jean dans le rôle de Mélisande, qu’elle rend mystérieuse, de Caroline Gélinas et de Rosalie Lane Lépine, qui incarnent respectivement Geneviève et Yniold, de même que les deux artistes français Guillaume Andrieux et Frédéric Caton, dont les Pelléas et Arkel sont dignes de mention. Mais les plus grands moments résultent de la prestation d’une qualité tout simplement exceptionnelle de Marc Boucher dans sa prise rôle de Golaud. Le timbre est beau, la diction impeccable et la sonorité pleine. Le tout crée des moments de pure beauté vocale, appuyés par un Orchestre de la Francophonie en meilleure forme qu’à la représentation du Festival Classica (voir la critique de Philippe Alexandre Pham, L’Opéra – Revue québécoise d’art lyrique, nº 16, p. 38).
Présentée en collaboration avec les Jeunesses Musicales Canada, la production de La Belle Hélène d’Offenbach n’atteint pas quant à elle le même niveau d’excellence. Seule l’Oreste de la mezzo-soprano Charlotte Gagnon mérite une mention honorable, de même que des éléments de la mise en scène d’Alain Gauthier.
La collaboration avec Tempêtes et passions pour l’événement « Tchaïkovski et les Russes » compte parmi les mieux réussies du festival. Les lyricomanes ont pu apprécier en très grand nombre les airs des opéras du grand compositeur russe chantés par Jessica Latouche, Marcel Beaulieu et Hugo Laporte, l’interprétation de l’air « Da, vspomnila, Podrugimilye » (« Oui, je me souviens, chers amis ») tiré de La Dame de pique par la soprano Luce Vachon s’avérant le moment le plus beau et émouvant du concert.
Avec l’édition 2018, on peut affirmer que le Festival d’opéra de Québec est arrivé à maturité. Pour son idéateur Grégoire Legendre et toute son équipe, le défi est dorénavant de maintenir son niveau d’excellence, voire de l’accroître de façon à ce qu’il s’élève au rang des plus grands festivals d’opéra de la planète lyrique.
Festival d’opéra de Québec (8e édition) - 24 juillet au 6 août 2018
Directeur général et artistique : Grégoire Legendre
Pelléas et Mélisande de Debussy, en collaboration avec le Festival Classica, 29 juillet 2018
La Belle Hélène d’Offenbach, en collaboration avec Jeunesses Musicales Canada, 30 juillet 2018
« Tchaïkovski et les Russes », en collaboration avec Tempêtes et passions, 2 août 2018
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