ARTISTE D'AILLEURS ICI - Karine Deshayes
Photographie: Aymeric Giraudel
La mezzo-soprano française Karine Deshayes a d’abord découvert l’univers musical par l’entremise de la pratique du violon, mais c’est en entendant une production de Norma au Palais Garnier qu’elle a eu un coup de foudre pour l’art lyrique. Elle s’est ainsi dirigée vers une formation musicale, qu’elle a complétée sur les bancs du Conservatoire national supérieur de musique et de danse de Paris, auprès de la soprano française Mireille Alcantara. En parallèle, elle a étudié le jeu théâtral avec le comédien Georges Werler, en plus de faire de l’escrime.
Après ses études, elle a intégré la troupe de l’Opéra de Lyon où elle a d’abord incarné plusieurs seconds rôles, et s’est ensuite formée à la vie professionnelle en tant que chanteuse d’opéra. C’est aussi sur la scène de l’Opéra de Lyon qu’elle a interprété pour la première fois Rosina du Barbier de Séville de Rossini, depuis devenu un rôle phare de sa carrière. Par la suite, ses engagements ont rapidement évolué vers des rôles-titres : Armida et Semiramide de Rossini, Carmen de Bizet, ou encore Alceste de Gluck. Son répertoire s’est du même coup élargi alors qu’elle a investi la musique baroque. Poppée du Couronnement de Poppée de Monteverdi, de même que Sesto dans Giulio Cesare in Egitto de Handel ne sont que quelques-uns des rôles qui lui ont été confiés et qui illustrent ce pan de sa feuille de route. Celle qui a été nommée trois fois « Artiste lyrique de l’année » aux Victoires de la musique classique (en 2011, 2016 et 2020) s’est désormais taillé une place de choix sur les grandes scènes lyriques du vieux continent.
Reconnue également pour ses interprétations belcantiste, Karine Deshayes a fait sa marque de commerce les répertoires de Rossini et de Bellini – elle a d’ailleurs chanté sa première Norma au Festival d’Aix-en-Provence à l’été 2022. Chanter Rossini comporte son lot de défi lorsque l’on sait toute la maitrise technique que ce répertoire exige de la part de l’interprète : virtuosité et changements de registre rapides côtoient tout autant de paramètres aussi demandant. L’enjeu selon Karine Deshayes est de parvenir à homogénéiser la voix dans les registres grave, médian et aigu afin que le passage d’un registre à l’autre ne donne pas l’impression de changer de voix.
Son passage à Montréal sera cependant l’occasion de l’entendre dans un autre répertoire, celui du grand opéra français. La production d’Hamlet de l’Opéra de Montréal est d’ailleurs la toute première à laquelle la mezzo-soprano prend part au Québec. Son unique visite précédente date de février 2023, alors que Karine Deshayes a été sollicitée pour enseigner des classes de maître à l’Université de Montréal et à l’Université McGill, donnant au passage un récital dont le programme était conçu de mélodies françaises.
Pour Karine Deshayes, c’est un réel plaisir de pouvoir chanter la Reine Gertrude dans cet opéra où les mélodies sont poignantes. « Il y a plusieurs moments où mes poils se dressent devant la beauté de la musique de Thomas », a confié à ce sujet la mezzo-soprano en entrevue. Ce rôle représente un défi intéressant sur le plan vocal, puisqu’il mobilise un ambitus très large allant, dans le registre aigu, jusqu’au contre-do. Cela rapproche ainsi l’œuvre de Thomas des grands opéras belcantistes que la mezzo-soprano a l’habitude d’interpréter. Incarner la Reine Gertrude s’avère aussi l’occasion pour Karine Deshayes de jouer un personnage au caractère plus sombre, ce qui n’est pas chose courante pour les mezzo-sopranos à l’opéra. C’est donc une tout autre facette dramatique que la chanteuse devra mobiliser pour rendre convaincant son personnage sur scène.
Près de 100 ans se sont écoulés entre l’unique production d’Hamlet au Québec et celle que l’Opéra de Montréal présentera dans quelques jours à la salle Wilfrid-Pelletier. Le fait que cet opéra ne fasse pas partie des œuvres souvent programmées par compagnies d’opéra n’est cependant pas unique au Québec ; Hamlet n’est pas non plus un monument interprété chaque année en France. « Je dirais que l’œuvre revient de façon cyclique tous les vingt ans, environ », commente la mezzo-soprano à ce sujet. Il ne faut toutefois pas établir de corrélation entre le nombre de productions par décennie et la valeur de cet opéra. « Amour, vengeance, trahison, pouvoir… Cette œuvre inspirée d’un fait historique connu déploie une grande palette de sentiments et d’émotions qui feront certainement voyager le public ! », conclut Karine Deshayes, en invitant le public montréalais à se joindre à cette grande aventure que sera Hamlet.
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