PORTRAIT- Jessica Latouche- un coup de foudre pour l'opéra !
Jessica Latouche
Photographie : Catherine Charron-Drolet
Originaire de Québec, la soprano Jessica Latouche poursuit actuellement des études doctorales auprès de Jean-François Lapointe. Les premiers prix qu’elle a remportés, d’abord au concours solo avec l'orchestre Canimex de la Faculté de musique de l’Université Laval en 2019, puis au concours d’art lyrique de la relève en fèvrier dernier témoignent du talent de la jeune chanteuse. Elle a d’ailleurs fait ses débuts à l’Opéra de Québec en mai 2019 en tant qu’Anna dans Nabucco de Verdi. Ce printemps, elle incarne Blanche de la Force dans la production des Dialogues des Carmélites présentée par l’Atelier d'opéra de l’Université Laval.
Qu’est-ce qui vous a décidé à vouloir faire carrière dans le chant lyrique?
J’ai toujours chanté. Toute petite, j’inventais des paroles sur les mélodies que j’apprenais pendant mes cours de piano. À 10 ans, j’ai joint la chorale des Petits Chanteurs de Charlesbourg. Grâce à cette chorale, j’ai eu une occasion unique : avec quelques autres choristes, j’ai été choisie pour prendre part à la production de Hansel et Gretel à l’Opéra de Québec, qui était présentèe dans une mise en scène de Jacques Leblanc et dirigée par Bernard Labadie. J’incarnais un pain d’épice et j’avais pris ce rôle très au sèrieux : je lui avais même donné une personnalité! Cette première expérience à l’opéra a été une grande découverte ; jouer la comédie en chantant et en dansant, avec des costumes et un maquillage m’a permis de constater que l’opéra est vraiment une forme d’art complète. Je me souviens aussi que la chanteuse qui incarnait Gretel, dont le nom m’échappe aujourd’hui, a complètement changé ma vision de la diva d’opéra qui, pour moi, était typiquement représentée par la Castafiore, soit une dame corpulente qui chantait fort ! Laà, c’était différent, cette chanteuse était jeune et belle ; ce fut le coup de foudre avec cet art !
Quelles rencontres ont marqué votre parcours ?
Il y a tellement de gens qui m’ont marquée! Toutefois, si je devais n’en nommer qu’une, je dirais que la personne qui reste déterminante dans mon parcours est Jean-François Lapointe. C’est un artiste d’une grande générosité et qui s’investit énormément. Je trouve son parcours vraiment inspirant ; il a travaillé de manière acharnée pour arriver où il en est maintenant, ce qui en fait un modèle pour moi. C’est à sa suggestion que j’ai entamé à l’automne 2018 un doctorat à l’Université Laval pour perfectionner mon interprétation de l’opéra français, sous sa direction.
Parlez-nous de votre participation dans la production des Dialogues des carmélites de l’Université Laval. Qu’est-ce que le rôle de Blanche vous a apporté?
C’est un rôle extraordinaire ! Et tout en complexité parce que Blanche passe vraiment par toute la palette des émotions. C’est un personnage d’origine noble qui a donc un statut à respecter ou du moins, une façade à maintenir, mais elle naît dans la tourmente, au beau milieu de la Révolution française, ce qui semble être la source de son tempérament. La musique de Poulenc est tellement magnifique, c’est vraiment une écriture musicale près de la parole, qui a un rythme très naturel. La mise en scène de cette production fait en sorte que je serai presque toujours présente sur scène, ce qui est évidemment assez exigeant, surtout que Blanche passe rapidement d’une émotion à l’autre ! La forte présence de Blanche permet en fait de montrer toute l’évolution de sa personnalité et je suis vraiment reconnaissante d’avoir la chance d’explorer ce personnage. En plus, la trame de l’opéra est inspirée d’une histoire vraie, ce qui rend cette œuvre d’autant plus touchante.
En 2019, vous avez pris le rôle d’Anna dans la production de Nabuccco présentèe à l’Opéra de Québec. Que retenez-vous de cette expérience?
En chantant un rôle dans une production de l’Opéra de ma ville, j’ai senti que je réalisais enfin le rêve que je chérissais depuis si longtemps... Retourner sur la scène de l’Opéra de Québec, cette fois en tant que soliste, m’a vraiment donné une bouffée d’énergie pour continuer à avancer. C’était une belle marque de confiance de la part de Grégoire Legendre de m’attribuer le rôle d’Anna. J’ai aussi eu la chance de travailler avec un metteur en scène qui avait décidé de faire une place significative à mon personnage, ce qui fait que j’ai été très présente sur scène durant l’opéra.
Est-ce qu’il y a un répertoire que vous préférez ou un rôle que vous espérez pouvoir jouer?
J’ai une préférence avouée pour le répertoire français et italien et récemment, j’ai travaillé Les Pêcheurs de perles de Bizet. C’est vraiment un très bel opéra, trop peu connu ici. C’est une œuvre très facile d’écoute, on reconnaît les
thèmes qui sont en fait de vrais vers d’oreille ! Parmi les rôles que j’aimerais interpréter, il y a évidemment celui de Violeta Valéry dans La Traviata pour les couleurs vocales et pour le drame qui rejoint beaucoup de gens. J’ai chanté le rôle de Donna Anna dans Don Giovanni et j’ai adoré ce personnage ; je le referais demain matin sans hésiter! Enfin, le rôle de Blanche de la Force dans les Dialogues des Carmélites est une belle découverte et je désire le refaire un jour.
Quel artiste lyrique vous inspire?
Au point de vue du parcours, je dirais que ce sont les artistes lyriques québécois qui m’inspirent le plus. Je trouve que c’est vraiment motivant de voir autant d’artistes de chez nous qui ont des carrières florissantes à l’international. Je pense notamment à Jean-François Lapointe, évidemment, mais également à Étienne Dupuis, Hélène Guilmette et tellement d’autres ! En ce qui concerne plus particulièrement l’aspect musical, une artiste que j’affectionne est Diana Damrau, autant pour sa voix que sa technique et son jeu.
Que souhaitez-vous pour la suite de votre parcours ?
Je vise à élargir ma carrière aux plans national et international. Je reviens d’ailleurs d’une tournée d’auditions en France et je compte poursuivre dans cette voie. J’ai déjà une tournée en Chine ainsi que des concerts en Belgique à mon actif, en plus d’être nouvellement représentée par MIC Artists pour l’Amérique du Nord. Ce n’est qu’un début, j’en suis convaincue !
NDLR : La production des Dialogues des Carmélites de l’Université Laval a été annulée après la première en raison de la pandémie de la maladie à Coronavirus (COVID-19).